Julie Johnson est une mère, une éducatrice et une écrivaine, formée comme Ambassadrice du climat à Toronto en 2015. Elle est co-créatrice et animatrice d'un programme d'autonomisation des jeunes de la troisième à la huitième année, axé sur les objectifs mondiaux des Nations unies. Son roman comique sur l'activisme climatique, Hill of Greens, est disponible sur Amazon, Apple, Kobo, et Barnes and Noble. Elle vit à Oro Medonte, en Ontario, et participe activement à des initiatives locales de justice sociale et climatique. Vous trouverez ci-dessous quelques extraits de ses œuvres autobiographiques, centrés sur son expérience de militante climatique.
Quelques nouveaux noms pour les émotions liées aux changements climatiques
Lorsque vous vous réveillez face à la dure réalité qu'est les changements climatiques, vous pouvez avoir quelques... sentiments.
Ces sentiments sont tellement distincts de l'urgence climatique que je crois qu'ils ont besoin d'un nom propre.
Intégrons ces mots à notre vie quotidienne, à notre usage commun. Je pense qu'il sera plus facile de partager nos sentiments et de nous soutenir les un.e.s les autres !
Éco-colère : ce pic d'indignation brûlante qui se produit lorsque vous voyez des gens faire des choix préjudiciables dont vous savez qu'ils entraîneront une (plus) grande dévastation environnementale et sociale. Ce sont ces choses qui vous poussent à crier au journal télévisé, un peu comme si vous y étiez : Pourquoi ? Pourquoi ? Pourquoi ?
L'éco-anxiété : cette intensité nerveuse et lancinante qui se produit lorsque vous pensez sans cesse à l'absence continue d'action cohérente sur les changements climatiques. Cela peut conduire à l'éco-mélancolie (regarder fixement par la fenêtre, en se demandant si les choses vont changer de votre vivant) et à l'éco-insomnie (regarder fixement le plafond, en se demandant si les choses vont changer de votre vivant).
L'éco-optimisme : un gonflement positif et stimulant dans la région du cœur, l'antidote à l'éco-anxiété et à l'éco-colère. Il vous oblige généralement à prendre des mesures pour lutter contre les changements climatiques, mais il peut aussi se manifester lorsque vous êtes inspiré par d'autres personnes qui agissent.
L’éco-extase : le bonheur rayonnant qui surgit spontanément lorsque vous êtes en train de prendre une action positive, grande ou petite, pour soutenir l'action climatique et la justice climatique. Vous ressentez un sentiment d'utilité, de connexion et de contribution au bien commun ! Ouais !
L’éco-cerveau gelé : la panique soudaine, les crachotements vocaux et le retournement d'estomac qui accompagnent l'oubli de tout, de tous les faits, même de votre propre nom, lorsqu'une personne qui nie l'existence du climat vous défie sur place. Cela arrive souvent avec les collègues de travail et les membres de la famille élargie. Il se dégèle des heures plus tard, sous la douche ou à trois heures du matin.
L’éco-sautes d’humeure : se sentir optimiste, se sentir désespéré.e, se sentir optimiste, se sentir désespéré.e, se sentir optimiste... cela se produit généralement lorsque vous faites défiler les médias sociaux, que vous voyez des tweets sur l'action positive en faveur du climat... et que vous commencez à lire les commentaires...
Alors, maintenant que nous avons de nouveaux mots, comment vous sentez-vous aujourd'hui ?
Les six phases de l'écriture sur les changements climatiques
Après avoir suivi la formation de Réalité climatique à Toronto en 2015, j'ai commencé à écrire sur la nécessité d'agir pour le climat.
Au cours de ces cinq années, j'ai écrit des lettres à la rédaction, des courriels à des politicien.ne.s, de nombreux tweets, des messages sur Facebook et, finalement, un roman comique intitulé Hill of Greens (sur un groupe d'activistes de l'action climatique qui essaient de sensibiliser aux changements climatiques tout en équilibrant les pressions quotidiennes de la « vie ordinaire » ... parce que le travail, l'amour, la santé et les obligations familiales ne disparaissent pas simplement quand on décide d'agir sur le climat).
Quand j'ai commencé à écrire, j'ai trouvé que c'était UN DÉFI !
Pardonnez-moi de crier TOUTES LES CAPITALES dans la phrase ci-dessus, mais c'est vraiment tout un défi de maintenir un comportement calme et rationnel pendant que j'écris ces textes.
Ça commence bien.
Phase 1 : Tonalité raisonnable (plus ou moins)
Cher.ère untel.unetelle ;
Les réalités des changements climatiques sont visibles sur les nouvelles et devant nos fenêtres : sécheresses, feux de forêt, vortex polaires instables, chaleur extrême, froid extrême, tempêtes puissantes, etc...
Mais alors je me dis : attendez, cette approche ne fait pas pleinement comprendre au lecteur ou à la lectrice la nécessité absolue d'agir.
Phase 2 : Formulation forte
Nous vivons en pleine catastrophe environnementale ! Nous devons résoudre ce problème immédiatement !
Mais alors je me dirai : attendez, c'est peut-être trop alarmant pour mon lecteur ou ma lectrice. Je veux les effrayer pour qu'ils.elles passent à l'action, mais, aussi, peut-être, ont-ils.elles besoin d'être inspiré.e.s ?
Je vais donc passer à...
Phase 3 : Un changement positif
Imaginez : des communautés saines, durables et justes, mettant l'accent sur le bien-être de l'environnement et de la société. Fini l'éco-anxiété ! Plus de malaise mélancolique et apocalyptique ! Ne serait-ce pas agréable ?
Continuez ! Concentrez-vous sur le positif ! Mais alors...
Phase 4 : LES LETTRES MAJUSCULES S’INSINUENT
Nous avons ici l'occasion de remodeler notre société afin de NE PLUS AVOIR À FAIRE FACE À LA PERSPECTIVE TERRIFIANTE D’UNE DISPARITION TOTALE DE LA CIVILISATION !
Ah, bon sang ! Comment ai-je fini par crier (encore) ? J'étais censée mentionner : une économie circulaire dynamique, des ressources alimentaires et en eau propres abondantes, une meilleure justice et égalité sociale, des modes de vie plus sains et plus actifs !
Peut-être que je m'y prends mal.
Phase 5 : L'absurdité créative prend le dessus
Je suis une voyageuse du temps qui vous appelle depuis le futur ! Vous devez [inintelligible] ou alors [inintelligible] ! Oh non ! Je ne peux pas maintenir le portail temporel du vortex plus longtemps ! Agissez maintenant sur les changement climatiques ou - [transmission terminée].
Phase 6 : Rien que des symboles
Je pense à abandonner. Je me demande si je ne devrais pas simplement écrire :
Qu'est-ce que c'est que ça ?! $&@& ?!
Ou peut-être que quatre emojis peuvent le couvrir : 🔥🌎🤯🤬
Le maire ou la mairesse comprendra certainement ce que cela signifie. Qu'y a-t-il d'autre à dire, vraiment ? Puis-je enfin cliquer sur « envoyer » ?
Et c'est là que je me retrouverais après une heure de travail d'écriture.
Je vous dis que c'est TOUT UN DÉFI, mais j'ai fini par me rendre à la Phase 7, qui est une combinaison des six précédentes, qui ont été tournées au hasard et combinées dans le roman susmentionné.
Quelqu'un me fera savoir si vous découvrez une Phase 8, m'voyez ?
Vous ne pensez pas ?
Il y a une absence assez remarquable dans notre culture pop en ce qui concerne les changements climatiques, vous ne trouvez pas ?
Où est le roucoulement de la chanson pop : tu es si chaude, chaude, bébé, je fonds comme de la glace polaire, bébé...
Ou la comédie romantique qui nous demande si la photographe animalière insolente peut gagner le cœur du PDG sexy de la compagnie pétrolière à temps pour arrêter le forage dans l'Arctique ? Allez, vous ne voulez pas savoir ce qui se passe ?
Où est l'émission de télévision sur un groupe d'ami.e.s divers de New York uni.e.s dans leurs efforts pour créer plus d'espaces verts urbains et de jardins alimentaires... mais tout cela tourne au comique ? C'est tellement drôle ! Je vous jure que vous allez l'adorer !
Ou que diriez-vous d'une autre série Netflix du style « choisissez votre propre aventure » ? Une série où, par exemple, vous êtes le.la leader de la nation et vous devez réduire les émissions de carbone... ou en subir les terribles conséquences ! Que ferez-vous ? Sauverez-vous la planète et l'humanité ? Ou pas ? VOUS DECIDEZ !
Apparemment, il ne suffit pas d'avoir d'innombrables rapports scientifiques, des rapports de l'ONU, des articles de presse, des bulletins météo et, à l'occasion, une série cli-fi de Margaret Atwood. Il nous en faut plus !
Donnez-nous une chanson à chanter ! Ou autre chose. Nous en avons besoin.
Vous ne croyez pas ?
Visionnaires, nous avons besoin de vous
Alors : elle veut savoir comment rester motivée face à « l'effondrement potentiel de la civilisation »... avons-nous des suggestions à lui faire ?
Quelque chose pour l'aider à maintenir son inspiration face aux boucles de rétroaction positive, ces étendues de destruction et de désolation toujours plus grandes qui sont déjà en jeu.
Je suis dans une file d'attente au moment où je lis ce courriel.
Je suis avec mes enfants, en train d'acheter des frites dans un restaurant d'été.
Je suppose que c'est une question qui me déconcerte pendant mes vacances : comment fonctionner dans la réalité, avec des questions similaires en tête...et quel aspect dois-je regarder, le POTENTIEL ou le COLLAPIDE ?
C'est une balançoire, si familière depuis mon enfance, quand la menace d'une annihilation nucléaire faisait fureur. Dans les clips, les nuages de champignons avaient un rythme et vous pouviez danser dessus. Il y avait des épisodes à la télévision montrant les conséquences d'une attaque nucléaire généralisée sur une ville qui aurait dû le savoir.
La folie de leurs mauvaises décisions vous a donné envie de vous arracher les cheveux.
Mais au moins, c'était un choix ?
Aujourd'hui (dit-elle dans son e-mail), l'apocalypse a déjà été choisie par un millier de personnes différentes qui ont appuyé sur mille boutons différents en mille jours différents et l'ont mise en œuvre.
Une cascade tournante et croissante de catastrophes écologiques se rapproche de plus en plus de notre horizon.
Mais le pouvoir de l'histoire nous sauvera sûrement. Si la crise climatique est intégrée dans nos clips vidéo et dans nos clics, ne réaliserons-nous pas alors notre véritable potentiel et n'essaierons-nous pas de nous pencher sur l'autre côté ?
Alors que je tends la main vers la bouteille de ketchup, je tends également la main vers les affirmations qui soutiennent le mélange de nos complexités créatives pour créer une troisième voie.
Nous avons besoin d'une voie de soins qui n'est pas encore entièrement vue ou réalisée (mais elle le sera bientôt, dans le prochain épisode), soutenant notre capacité à prendre des virages surprenants dans l'intrigue, à surprendre des invité.e.s et à changer de paradigme.
S'il existe des visionnaires qui invoquent le pouvoir des récits pour nous sauver, réparer nos systèmes brisés et guérir notre conscience globale, alors je suppose que vous feriez mieux de vous atteler à affirmer que nous sommes les gardien.ne.s mûr.e.s et sages de notre avenir, ni suicidaire ni mortel.
Il est temps pour vous, les visionnaires, d'avancer parce que nous sommes aligné.e.s, nous attendons et quelqu'un doit répondre à cette femme.
Elle veut savoir comment rester motivée face à « l'effondrement potentiel de la civilisation ». Que devrais-je lui dire, au nom de l'humanité ?